2036

Tests de corrosion MYRRHA

Le SCK CEN bat un record du monde

20 000 heures de test de corrosion : 7 000 heures de plus que le précédent détenteur du record du monde

Le SCK CEN bat un record du monde

Vers 2036, le SCK CEN terminera la construction de l’infrastructure de recherche innovante MYRRHA, une installation unique au niveau mondial. Les préparations battent leur plein et la recherche sur les matériaux joue un rôle clé à cet égard. « Durant les tests de corrosion, nos matériaux de structure ont battu tous les records. Tout indique qu’ils restent indemnes durant le temps de séjour requis dans le coeur du réacteur », déclarent les chercheurs impliqués.

Un complexe de tubes étincelants domine le hall de technologie du SCK CEN, où de nombreuses expériences ont été réalisées pour la future infrastructure de recherche innovante MYRRHA. Cet imposant complexe de tubes constitue la boucle de corrosion la plus puissante au monde contenant un eutectique de plomb et de bismuth liquide. L’installation dénommée CRAFT pompe en continu 400 litres de plomb-bismuth à travers les tubes à une vitesse de 2 mètres par seconde. Cette boucle vise à valider la résistance à la corrosion des matériaux de structure sélectionnés, dans le cadre du projet MYRRHA, suite au contact avec le plomb-bismuth liquide.

Erich Stergar, chercheur au SCK CEN et coordinateur de la recherche sur la structure des matériaux :« Le plomb-bismuth est un métal liquide avec lequel nous refroidirons le coeur de MYRRHA. Nous devons nous assurer que les matériaux de structure sélectionnés pourront résister sans problèmes aux conditions extrêmes dans le réacteur de recherche. L’installation CRAFT est un outil crucial pour déterminer la corrosion autorisée dans des composants tels que les éléments combustibles, les tubes caloporteurs, la cuve du réacteur et les autres composants. »

Plus la température est élevée, plus il y a de corrosion. Nous avons donc étudié le pire des scénarios.

Rafaël Fernandez
Un record du monde

Un record du monde

En 2019 les chercheurs du SCK CEN ont mené une expérience de corrosion à grande échelle. L’enveloppe en acier inoxydable qui contiendra le combustible, a passé plus de 20 000 heures à 400°C dans le plomb-bismuth liquide. « Nous avons réalisé un nouveau record du monde », s’exclame Stergar. Le précédent record détenu par le Karlsruhe Institute of Technology en Allemagne affichait 13 000 heures au compteur. Si les matériaux ont résisté à la corrosion ? « Oui, sans aucun doute », affirme-t-il.

Quoique les conditions soient encore plus extrêmes durant cette expérience que dans l’infrastructure finale. Dans la cuve de réacteur de MYRRHA, la température oscillera entre 220°C et 400°C. L’ingénieur Rafaël Fernandez qui travaille à la conception de MYRRHA explique : « Dans les éléments combustibles, nous mesurons localement des températures qui peuvent aller jusqu’à 400°. Pour refroidir le cœur, on fait couler un liquide plomb-bismuth à travers le cœur. Au moment où le plomb-bismuth entre dans le cœur, sa température est de 220°. A la sortie du cœur, le liquide a une température moyenne de 306°C. »

Le pire des cas

Les composants de MYRRHA ne seront donc pas continuellement exposés à une température de 400°C alors que dans l’expérience de corrosion à grande échelle, c’était le cas. « Plus la température est élevée, plus il y a de corrosion », déclare Fernandez. Dans MYRRHA, les éléments combustibles restent dans le cœur du réacteur durant 18 cycles, mais ils ne supportent une température de 400°C que durant deux cycles. « Notre expérience a duré 20 000 heures soit 9,3 cycles. Nous avons donc bien examiné le pire des scénarios », poursuit-il.

Ce sont ces variations de température qui font l’objet du suivi des recherches. En 2020, les chercheurs simuleront les conditions réelles dans MYRRHA et soumettront les matériaux de structure à diverses températures dans le plomb-bismuth liquide. « L’objectif est de qualifier le matériau de base », explique Stergar. Ce faisant, les chercheurs n’ont franchi qu’un nouvel obstacle. « MYRRHA n’est pas seulement composé de matériaux de base. Les matériaux de base sont soudés ou assemblés de telle sorte qu’ils puissent se mouvoir. Comment ces assemblages réagiront-ils à des conditions extrêmes ? Dans quelles mesures seront-ils résistants à la corrosion ? Leur remplacement sera-t-il aisé ? C’est à toutes ces questions que nous voulons répondre dans les prochaines étapes de notre recherche », conclut le chercheur.

Si les matériaux résitent à la corrosion ? Oui, bien sûr !

Erich Stergar

Un peu d’oxygène fait respirer le matériau

Comment se produit la corrosion ? La gaine en acier inoxydable qui entoure le combustible est un alliage de fer, de chrome, de nickel et de carbone. Le mélange plomb-bismuth qui s’écoule le long du tube, ronge le nickel – et dans une moindre mesure le chrome – de l’acier. De ce fait, l’épaisseur de la gaine change : elle s’amincit. « La gaine est la première barrière physique du combustible d’uranium et ne peut donc pas se désintégrer », explique le chercheur Stergar. Pour éviter cela les scientifiques ajoutent un dé à coudre d’oxygène. « Lorsque l’acier inoxydable entre en contact avec l’eau, une fine couche se forme et va protéger l’acier. Avec le plomb-bismuth liquide, on doit seulement ajouter un tout petit peu d’oxygène pour obtenir cette même couche de protection. Cependant la concentration doit être très limitée, juste assez pour créer cette couche de protection mais pas suffisamment pour oxyder le plomb-bismuth. Cela bloquerait le refroidissement du cœur. » Les chercheurs visent une valeur de 10-7 pourcents en poids dans le plomb-bismuth liquide, ce qui correspond à environ 1 gramme d’oxygène pour 1000 tonnes de plomb-bismuth. La cuve du réacteur MYRRHA contiendra 7600 tonnes de plomb-bismuth. Un dé à coudre d’oxygène devrait alors suffire.

Sa Majesté le Roi en visite au SCK CEN

Sa Majesté le Roi en visite au SCK CEN

Sa Majesté le Roi a effectué une visite de travail le 26 juin 2019 au SCK CEN à Mol. La raison de cette visite était la décision du gouvernement de 2018 de construire MYRRHA en Belgique, une première mondiale. « Cette nouvelle infrastructure de recherche unique va attirer des jeunes chercheurs dynamiques du monde entier », se réjouit Hamid Aït Abderrahim, directeur général adjoint du SCK CEN et directeur du projet MYRRHA. Grâce à la décision du gouvernement, la réalisation de MYRRHA a fait un grand bond en avant. C’est ce que Sa Majesté le Roi a pu constater durant sa visite de travail.

« Exploring a better tomorrow ». Ainsi sonne notre nouveau slogan. Il reflète parfaitement notre mission : développer des applications innovantes pour la société. L’ingéniosité scientifique est nécessaire pour trouver de nouvelles idées, mais ce n’est qu’avec une gestion de projet stricte que nous transformons cette idée en réussite. Que voulons-nous réaliser ? Quels sont les jalons du projet ? Quand sommes-nous censés les livrer ? Nous continuons à nous poser ces questions, afin de continuer à travailler ensemble efficacement. Notre regard sur la date convenue, notre vision de la société.

 

Adrian Fabich (MINERVA Design and Build)